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Jean-Pierre Bocquet
18 mars 2009

Indignations

Mercredi 18 mars 2009. Soleil splendide. On en oublierait presque les fumées industrielles et portuaires qui asphyxient le ponant et vont ensevelir Phébus plus tôt que prévu. A Dunkerque en effet, contrairement à ce qu’a pu psalmodier Baudelaire, le long linceul de la nuit nappe autant l’Occident qu’il ne traîne à l’Orient.
Pour moi qui aime la vie, qui accueille chaque seconde qu’il m’est donné de vivre comme si c’était la dernière, il ne s’agit donc pas de bouder les bienfaits d’une journée ensoleillée.
Pendant ce temps, du voyage du Pape à l’imminente journée de mobilisation sociale, les journalistes nous enténèbrent, orchestrant avec un art consommé tout ce qui peut nous plomber et nous confiner dans la sinistrose. Ce faisant, ils compliquent les situations qu’ils évoquent plus qu’ils ne les éclairent. Pensez donc ! Un progrès en gestation qu’ils paralysent, un dialogue qu’ils avilissent en polémique c’est leur seul credo commercial. Il fut un temps où ils se contentaient des « marronniers » pour relancer les tirages, désormais ils cultivent les plantes vénéneuses dans leurs bulles médiatiques…
Et curieusement, personne ne réclame une sorte de révolution écologique de la presse pour lutter contre la pire des pollutions, celle de l’esprit.
Tout ce que j’attends d’un journaliste, ce ne sont pas de feintes indignations devant des déclarations qu’il a suscitées lui-même sciemment tout en sachant qu’elles ne pourraient pas être autres que ce qu’elles sont, c’est tout simplement qu’il m’informe sur les causes réelles des dysfonctionnements de l’humanité. Et la pandémie de sida,  qui crucifie en Afrique des légions d’enfants et de femmes qui n’en peuvent mais, n’est pas apparue ex nihilo hier, suite à un propos malencontreux du Pape (que chacun est bien entendu libre de déplorer et de condamner). Elle a des causes complexes et multiples qui sont souvent liées à nos propres égoïsmes… Mais je me rassure : dans quinze jours, nos gourous des médias s’égosilleront à l’envi et à tire larigot sur les possibles frasques d’untel ou de tel autre. La mort pourra œuvrer en toute sérénité en Afrique et les ONG la combattre avec des clopinettes, dans l’indifférence totale et l’absolu silence des plumitifs et des indignés cyniques des heures de grande écoute.
Mercredi qui s’écoule et soleil qui s’éloigne… Je pense soudain à mes élèves et étudiants myopathes de l’Hôpital Maritime. Ils savouraient bien plus que moi la douceur d’un rayon printanier. Ils communiaient bien plus que moi à la beauté de Baudelaire, à l’élévation d’une symphonie de Bach, à l’admirable patience des marées toujours recommencées… Je pense à Frédéric et Sébastien, à leur humour sans faille, à leur courage lucide, à leur bonheur d’être et de partager… Ils ont su m’initier à cet amour de la vie parce qu’ils m’ont fait comprendre que le bonheur n’est ni un droit ni un dû mais une conquête permanente.

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