Chancres
Lundi 3 août 2009. Voici une info
qui m’attriste et me sidère : dixit un article de l’Express n°
3030, 60 000 platanes qui bordent le canal du Midi sont « amenés
à disparaître ». Il paraît qu’il paraît
qu’ils sont menacés d’extinction parce qu’ils auraient été
contaminés par un chancre coloré qui infectait le bois des
caisses de munitions que transportaient les GI qui débarquèrent
durant la seconde guerre mondiale… Le package c’était en somme la
libération, les doryphores et le chancre.
On va donc liquider ces platanes
à l’article de la mort et les remplacer par d’autres essences… pour
quel coût et quels paysages? Le canal du Midi deviendra ainsi le
canal démuni et des minis. Mais ici comme ailleurs les irresponsables
voleurs d’ombre et de chlorophylle sont à l’œuvre… Á Dunkerque
par exemple, ils déboisent berges et rues en invoquant là
aussi je ne sais quels chancres ou moisissures.
Je crains hélas que bien
souvent le seul vrai chancre soit celui de notre civilisation de rentabilité
: bouches inutiles, hommes ou arbres fragilisés, platanes qui vous
accommodez des maux de la vieillesse au voisinage des eaux nonchalantes,
les plans sociaux, le nettoyage par le vide et, pourquoi pas, les éradications
sanitaires auront raison de vous !
Et quand, faute de platanes, le
chancre coloré disparaîtra à son tour ; quand faute
de vivants contaminables, les pandémies s’étioleront ; quand
faute de salariés licenciables, la notion même d’entreprise
n’aura plus cours, Dieu – s’il existe – n’aura plus qu’à délocaliser
la planète bleue…
Á l’heure où nos
vedettes et hommes publics se font tirer, injecter, greffer, botoxer, lifter,
céramiquer, hydrothéraper par tous les trous, antioxyder
et ozonothéraper pour rester jeunes, difficile de croire que le
génie humain manque d’inventivité pour sauver des platanes
ou des entreprises…
N’en demandons cependant pas trop
à nos innombrables têtes pensantes éprises de casting
et de communication : vu l’énergie et les moyens qu’elles dépensent
pour sauver les comptes en banque, il est normal qu’elles n’en aient plus
pour la survie de la planète ou de l’humanité… et ce chancre,
ce trou dans la couche des mentalités est aussi tragique que les
trous dans la couche d’ozone.