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Jean-Pierre Bocquet
9 février 2012

De Frédéric, message sur facebook

  • Frédéric Silva

    Il est 4h42, ne pensez pas que je sois insomniaque, mais de garde de nuit au bloc des urgences de Salengro (CHRU de Lille), je vois ici défiler nuit après nuit la ritournelle de cet échantillon représentatif de notre société de consumation avec toutes ses ambiguïtés, ses fantasmes alambiqués, ses déboires, ses lacunes, ses perversions ; cela me donne parfois du temps libre que je dépense avec parcimonie à travers ces livres : romans, essais, thrillers, témoignages, classiques ; bref un panel éclectique qui nourrit mon imaginaire de soignant, de "Hannibal lecteur" et joue ses influences jusque dans la prise en charge psychanalytique de mes semblables. J'ai parfois, je vous l'avoue, la nette impression de parcourir un zoo humain.Et pour ne pas me projeter sentimentalement dans les miasmes de cette inhumanité parfois (soupape de sécurité du soignant), je me nourris avec narcissisme de ce regard envers mon prochain qui ressemble à s'y méprendre au tri sélectif et réducteur de votre Leboulicaut. Bien qu'il n'arrive que tardivement et pour cause, son cynisme explose le roman comme un bouquet final. Je vous remercie pour le feu d'artifices. Votre intrigue était rudement bien menée. J'aime la manière dont un auteur s'amuse avec le lecteur pour le perdre en conjectures pendant toute l'oeuvre ; cet art de lancer l'amorce, de le laisser filer, puis de le ramener en douce lui laissant espérer que c'est lui-même qui dirige le polar alors qu'il n'est qu'un pion utilisé dans chaque focale. Il m'avait fallu du temps pour comprendre l'art de ferrer le lecteur afin qu'il ne puisse plus sortir du roman, jusqu'à la prise finale, son oraison funèbre, car "Si le grain ne meurt", pour ne citer que lui, comme vous l'avez cité, le mot FIN n'est jamais une fin en soi, mais le début d'une autre réflexion, mais là, curieusement, l'auteur n'est plus. Le lecteur se retrouve seul, face à sa destinée. Son livre est terminé et le poisson sorti de l'eau s'asphyxie doucement de ces milliers de mots qui ont hanté son imaginaire fertile. Que devient-il ? Il en redemande, histoire de se replonger dans ses idiosyncrasies, dans cette addiction virtuelle qui lui fait un peu oublier le remugle de sa propre existence de confetti perdu et confit dans la masse

  • Voilà où j'en suis après ces quelques lettres "F-I-N-", qui me ramènent à cette réalité. Il est un peu plus de 5h, un AVP est signalé, le SMUR le ramène et le cycle recommence. Ce soir, pour ma dernière nuit de garde, j'attaquerai l'autre ouvrage de mon"grand Maître dunkerquois".

 

  • Toute critique se doit d'étaler les arguments pour et contre, cette dualité presque manichéenne afin de permettre à l'auteur de plancher sur ses éventuels points faibles. C'en est presque un postulat, celui de dire que l'erreur est formative.
    Je citerai comme point négatif, ce qui me paraît essentiel, mais qui ne vous concerne heureusement pas. Je blâmerai l'éditeur et sa chaîne de production.
    Le titre : "Sous le signe d'Othmane" initial, rassemblait l'identité même de l'oeuvre. Point n'était besoin d'ajouter "Dunkerque" pour montrer que ce livre venait du Nord. Je reproche aux infographistes de Ravet-Anceau, cette manie de faire passer de véritables chefs-d'oeuvre pour des romans de gare. représenter un ouvrage par une image médusée, dénuée d'intérêt avec une griffe : ici, "Le tueur au cutter a encore frappé", digne d'un étalage d'un hebdo de type "Détective" avec ses publicités aguichantes presque vulgaires. L'image même des docks n'est pas porteuse. Lorsque l'on connait l'intrigue et que l'on se nourrit de l'image de couverture, c'est affligeant de cruauté envers l'auteur. C'est un crime. Imaginez Mozart, représenté par une image d'aigle germanique sur la pochette CD, Gide caricaturé par le double symbole homme-femme...
    Moi, je me mets à la place du potentiel lecteur. Ce type de livre n'est pas porteur à la vue, lorsque l'on sait que 80% d'un livre est vendu par sa couverture. Les éditions "SONATINE", l'ont bien compris et mettent en avant un titre cinglant qui interpelle dans le message et dans le mystère, suivi d'une image aux couleurs choisies, déconcertante qui donne envie d'aller regarder la quatrième de couverture, d'y lire un résumé encore plus attrayant, éventuellement un court portrait de l'auteur placé à l'intérieur en jaquette. La trame même de la qualité du revêtement du carton: mat, super lisse. Enfin; la mise en page revêt pour moi une importance capitale. La disposition des chapitres avec un saut de page impaire aère (ici, les chapitres se suivent sur la même page, comme si l'éditeur avait peur de gâcher un peu plus de papier ; cela fait réellement pingre), le format même de l'ouvrage proche du poche diminue singulièrement les affranchis, amoureux de la belle écriture. Certes, l'habit ne fait pas le moine et vous en êtes une preuve vivante, si l'on en juge la qualité littéraire du contenu. Mais on ne peut négliger l'importance du contenant, le costume, le papier cadeau d'une oeuvre. Vous méritiez mieux que cela, j'en suis frustré. Bon nombres d'auteurs de Polars en Nord subissent le même revers. Il est vrai que cela n'empêche pas de vendre lorsque l'on voit le chiffre d'affaire de Ravet-Anceau, mais tout de même, je trouve que l'on gâche la marchandise. C'est le consommateur qui parle, lorsqu'il fait un choix en librairie. Je pense à monsieur tout le monde. Et qu'on ne me sorte pas
    'argument : le faible prix stimule la vente. Je n'achète quasiment jamais de format poche parce que justement j'aime le format d'un livre, son aspect charnel, sa mise en page, sa police, la qualité du produit haut de gamme avant même de parcourir l'écriture sur laquelle je vais maintenant m'attarder. Bref, tout ce que l'auteur, l'éditeur, l'infographiste a développé pour me servir un véritable plat. Quant au prix : on en a toujours pour son argent et cela ne m'a jamais rebuté de payer deux à trois fois le prix d'un poche pour un format classique, parce qu'un vrai livre se garde ; un poche se jette ; ce n'est pas un livre. Le livre recelle une part de nos émotions transcrites entre les lignes, celles qui seront à jamais figées dans nos mémoires. En regardant la bibliothèque et en touchant ce livre qui nous a fait vibrer, on ressentira encore dans nos entrailles certains moments frissons. En l'ouvrant, ceux-ci deviendront "Jumanji". Donc, oui, sa construction mérite une architecture, une trame, un squelette, des matériaux appropriés, une tunique digne de lui. Là, c'est le tout jeune auteur qui parle, celui qui apprend encore à écrire et qui va s'instruire à la source du savoir, qui sait ce qu'il veut et surtout ce qu'il ne veut pas.
  • A Dainville, j'ai tout vendu, je ne savais plus où donner de la tête, parce que j'avais tout fait pour attirer l'attention et mes arguments consistaient à expliquer la couverture et l'aspect métaphorique du titre et allégorique de l'image. Pourtant la qualité littéraire issue de mon imaginaire est loin de concurrencer la vôtre, et pour cause. Ce n'est ni de la fausse modestie, ni de l'obséquiosité mal placée. IL faut savoir connaître ses limites et rester humble. La manière de transcrire toute l'identité même de l'ouvrage est importante dans ce qui permet l'attraction visuelle ; ça, je n'en démordrai pas. Ce n'est pas ma faute, le monde fonctionne ainsi, c'est un procédé marketing développé depuis des décennies.

    Voilà, tout est dit et ne doit surtout pas ternir la première partie de mon propos.

    Vous pouvez disséquer à l'envie chaque phrase, la placer dans votre blog si vous le souhaitez. J'ai écrit avec passion, mes sentiments à chaud. Oui, je suis frustré de l'avoir déjà terminé. C'est la loi. J'en connaissais les règles. Si un jour, Ravet-Anceau publiait en grand, avertissez-moi, j'achète de suite. Jean-Pierre Bocquet est une valeur sûre. Comptez sur moi pour plébisciter Othmane.

    Je vous remercie pour cette aventure. Une autre attend mon réveil ce soir. Je vous dois une émotion.
    Merci.

    Amicalement,
    Frédéric : l'intermittent du spectacle de la vie.

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